La falaise bretonne

La falaise bretonne

« Ce qui est d'ailleurs, le propre d'une chute : ne pas vous laisser le temps de ne pas tomber. »

— « Merde ! » ?
— Oui.
— Vous avez dit « Merde ! » ?
— Oui, oui, c’est ce que j’ai dit ! J’ai dit « Merde ! ». Ça m’est venu comme ça : « Merde ! ». Que vouliez-vous que je dise d’autre ?
— Vous n’étiez pas obligé de dire quelque chose.
— Oui, c’est vrai. Mais moi, j’aime bien dire, quand je fais les choses. Et puis, je trouve que « Merde ! », ça sonne juste, dans ce cas précis, non ? Vous ne trouvez pas que mon « Merde ! » était approprié ? Quitte à dire quelque chose, autant que ce soit explicite pour le plus grand nombre, vous ne pensez pas ? Vous avez dit quoi, vous ?
— Rien.
— Ah.
— J’ai pas eu le temps.
— Évidemment.
— Ce qui est d’ailleurs, le propre d’une chute : ne pas vous laisser le temps de ne pas tomber. Sinon, c’est un trébuchement, tout au plus.
— Évidemment.
— Mais, puisque vous me le demandez, si j’avais eu le temps, je pense que j’aurais dit : « Oh mon Dieu ! Je tombe d’une falaise bretonne ! ».
— Bien, bien, bien. Mais, dites-moi, tous les fantômes ont cet humour-là ?
— Non, pas tous : vous verrez, certains d’entre nous ont parfois encore plus d’esprit.

© 2018 Sara Afonso – Tous Droits Réservés

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